Pelvoux
Un péage au parking du Pré de Madame
Carle
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L'information sur l'instauration d'un péage au parking du Pré
de Madame Carle a provoqué plus de 500 clics en quelques heures et a suscité
de nombreux commentaires. Tous hostiles en général, même si les commentaires des
locaux apparaissent plus mesurés, peut-être parce qu'ils connaissent mieux la
problématique. Voici donc quelques éléments complémentaires, non pour justifier
ou condamner la décision, mais simplement pour aider à comprendre la situation.
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La problématique est simple : d'un côté, ça coûte cher à la
commune, le parking est à réaménager, des toilettes sèches sont à construire et
le chemin d'accès aux glaciers emporté par les crues des derniers étés est à
refaire ; d'un autre, la majorité des visiteurs à la journée résident en dehors
de Pelvoux et souvent hors de la vallée et ne consomment pas localement.
Il n'y aurait donc pas de recettes locales indirectes suffisantes pour financer
les travaux d'aménagement ou d'entretien.
Avec de l'ordre de 95 000 visiteurs par an, le Pré de Madame
Carle est le site le plus visité des Hautes-Alpes. Le nombre moyen de
véhicules sur le parking en été est de l'ordre de 400 par jour avec des pointes
à plus de 800 aux alentours du 15 août. Il y a en moyenne 2,61 personnes par
véhicule. Les navettes existantes, car il en existe déjà, n'ont pas eu d'impact
significatif sur le nombre de véhicules. 82 000 visiteurs commencent à marcher
(la dalle de comptage est située avant la première passerelle), soit près de 900
personnes par jour qui empruntent le sentier, donc 1800 passages journaliers.
Pour éviter le parking payant il faudrait donc trouver d'autres
ressources. Le Pré de Madame Carle est un site touristique majeur. C'est
un site d'intérêt départemental, régional, national (le plus visité d'un parc
dit national). Le site participe à l'économie touristique et à l'attractivité du
département et de la région qui en tirent des recettes indirectes et qui
devraient donc participer au financement de sa mise en valeur.
Comme écrit par un correspondant : « Plein de communes de la
Haute-Durance profitent des retombée économiques sans devoir gérer les nuisances
: certaines qui n'ont pas le même site ont plus d'argent parce que plus de place
et plus de restos pour accueillir des vacanciers ; d'autres n'ont plus ni argent
ni vacanciers parce qu'elles ne sont pas assez fun pour les sportifs et trop
rustiques pour les nouveaux vacanciers montagnards... »
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Les péages (parking ou routier) en lien ou non avec des navettes
gratuites ou payantes ne sont plus pas un sujet tabou. Il en
existe plusieurs dans les Pyrénées (Cauterets, grand site de Pont d'Espagne),
dans les Alpes (vallée de la Clarée, haute vallée de l'Aigue Blanche, Lac
d'Allos) et ailleurs (Pointe du Raz, Mont Saint-Michel, etc.). Ils résultent en
général d'une sur-fréquentation et de ses effets négatifs. Dans ce cas, une
baisse de fréquentation due à la tarification doit être assumée.
La navette de la Clarée est largement subventionnée et son tarif
n'est pas excessif (2 € le trajet, 4 € l'AR), celle de Saint-Véran par contre a
un tarif dissuasif (9 € le trajet) mais elle tourne probablement en DSP plutôt
qu'en régie. A confirmer. Le système du Lac d'Allos* est assez astucieux et
donne satisfaction.
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Parmi les commentaires, il a été question de navette gratuite au
lieu du parking payant. Le débat à propos de la navette n'est pas nouveau, mais
il se heurte à la difficulté majeure qu'une navette gratuite, ça n'existe pas,
et qu'une navette payante qui équilibre ses comptes avec un tarif non dissuasif,
ça n'existe pas non plus. Il faudrait donc qu'elle se justifie par un intérêt
touristique d'ordre supérieur, impliquant là encore les financements
correspondants. Un bon point toutefois, si une navette devait exister un jour,
il y a de vastes parkings inutilisés l'été à la station des Essarts.
Il a aussi été fait état de tarifs préférentiels pour les
habitants. C'est une pratique tout à fait illégale, car contraire au principe
d'égalité des usagers d'un service public. Des tarifs préférentiels ne peuvent
se justifier que par des conditions d'intérêt général en rapport avec
l'exploitation du service ou par des différences objectives de situation des
usagers concernés (qui par contre peuvent s'appliquer à des professionnels de la
montagne). La qualité de contribuable local ou l'existence d'usages ancestraux
ou toutes autres considérations ne peuvent non plus être avancées. C'est
toujours le principe d'égalité des usagers qui prime, que ce soit pour un
parking public ou pour des remontées mécaniques. Difficile d'ailleurs à la
jurisprudence d'être plus claire sur ce point, elle en est même cinglante [Cour
administrative d'appel de Bordeaux, Arrêt n°06BX01607, 13 novembre 2007]. Ceci
dit, une mise en place de tarifs réduits allant jusqu'à la gratuité est
possible... tant que personne ne les attaque ! C'est (ou c'était) le cas pour le
parking de la Pointe du Raz.
Certains ont évoqué le risque de stationnement sauvage avant le
parking. C'est un risque qui serait minimisé si le péage était placé au
Pont du Ban ou carrément à la sortie d'Ailefroide - dans ce cas il
s'agirait d'un péage pour l'accès au vallon de Saint-Pierre. Mais la
route d'accès étant départementale, le péage sera vraisemblablement à l'entrée
du parking. Des stationnements sauvages sont donc possibles, sinon probables,
pas forcément pour une question de coût mais aussi pour une question de
principe. On notera que si Pelvoux optait pour la présence de personnel,
l'absence d'investissement permettrait de faire des tests pour trouver le
meilleur emplacement et laisserait toute liberté pour arrêter ou poursuivre
selon les résultats.
Beaucoup ont évoqué le risque d'une baisse de fréquentation.
C'est un risque, fonction du montant du péage, des contraintes, etc. Une baisse
de fréquentation serait logique (on peut penser à la presque vingtaine de % de
gens qui soit ne s'arrêtent pas, soit repartent au bout de 20 minutes), mais
l'effet et son ampleur sont difficiles à prévoir et à évaluer. Avec un montant
de péage de 2 €, l'impact resterait faible.
À confirmer ou infirmer par l'expérience qui
peut seule permettre de conclure. L'exemple du Lac d'Allos*, site le plus visité
du Mercantour avec quelques 60 000 visiteurs, ne montre pas d'impact
significatif sur la fréquentation. _______________
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Vallouimages
Vallouise, 27 mars 2013
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