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Impacts du changement climatique et transition(s)

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Le Groupe régional d’experts sur le climat en région Provence-Alpes-Côte d’Azur (GREC-SUD) vient de publier un cahier thématique sur les effets du changement climatique sur les territoires des Alpes du Sud. Il représente une synthèse de travaux scientifiques afin d’évaluer les impacts du changement climatique sur le territoire et de proposer des pistes d’adaptation et d’atténuation concrètes.

C'est un rapport de qualité et d'une grande cohérence qui doit « donner l’envie d’agir ». J’en ai extrait ci-après les principaux points traités.

Cahier thématique  GREC-SUD

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L'évolution du climat dans les Alpes du Sud

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Il rappelle que, si la température de l'air à l'échelle mondiale a augmenté d'environ 1 °C en moins de 150 ans, l'augmentation est beaucoup plus importante dans les régions montagneuses de tous les continents.

Dans les Alpes du Sud, la hausse est proche de 2 °C.

Sur la période 1959-2009, elle se traduit par une augmentation des températures moyennes annuelles d’environ 0,3 °C par décennie, plus marquée en été (+0,4 à 0,5 °C par décennie) qu'en hiver (+0,1°C par décennie) et en automne (+0,2 °C par décennie). Ce qui explique que la diminution du nombre de jours de gel, nettement détectable en altitude, est moins spectaculaire dans les vallées : vers 1500 mètres d’altitude, on passe d’environ 150 jours par an dans les années 60 à un peu moins de 130 jours actuellement.

Du côté des précipitations, le signal du changement climatique est encore incertain. Les précipitations présentent une très grande variabilité interannuelle. Sur la période 1959-2015, si les pluies annuelles sont en très légère baisse, les pluies de printemps sont en faible augmentation. Il en est de même pour les précipitations neigeuses où les tendances de fond à la diminution, dépendantes de l'altitude et du massif, se combinent avec la forte variabilité interannuelle.

Embrun - Nombre de jours avec Tmax > 30 °C

Source Cahier thématique, p. 8.

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L'avenir des glaciers des Alpes du Sud

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Les impacts de ce changement climatique sont déjà importants en haute montagne avec un retrait généralisé des glaciers :

  • tous les glaciers avec des bassins d’accumulation en dessous de 3500 m d’altitude seront amenés à disparaitre d’ici la fin du XXIe siècle ; dans le massif des Écrins, sur les 256 glaciers ou fragments de glaciers (fragmentation favorisée par le retrait glaciaire contemporain), seuls 25 d’entre eux seront encore présents à la fin du siècle ; 

  • la majorité du pergélisol ou permafrost des Alpes du Sud est probablement en cours de dégradation, avec une fonte plus ou moins avancée de la glace, d’où les écroulements rocheux qui se multiplient ;

  • les glaciers rocheux sont devenus instables. Leur vitesse a tendance à augmenter, parfois jusqu’à la rupture, et est à l’origine de risques émergents.

Glacier rocheux de Laurichard

Glacier rocheux de Laurichard dont la vitesse a considérablement augmenté ces dernières années.

Photo Vallouimages. Septembre 2011.

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L'évolution des risques naturels dans les Alpes du Sud

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Les risques naturels sont aussi impactés :

  • on devrait assister à une réduction globale de l’activité avalancheuse au cours du XXIe siècle, sauf à haute altitude durant l’hiver où l’activité augmenterait temporairement, avec une augmentation de la part des avalanches de neige humide dans l’activité totale ;

  • malgré les incertitudes, le changement climatique semble bien être un facteur aggravant des mouvements de terrain et des laves torrentielles, avec impact sur les équipements routiers et touristiques ;

  • les risques d’incendie devraient augmenter rapidement avec allongement de la période propice et extension de la zone géographique en altitude et vers le nord, favorisés par un climat plus favorable, une végétation forestière en expansion, un recul des activités agricoles et pastorales qui entretiennent la végétation et maintiennent les paysages ouverts, et une multiplication des activités humaines.

Queyras - Glissement de terrain du Pas de l'Ours

Queyras - Glissement de terrain du Pas de l'Ours. Source Cahier, p. 18.

Le front du glissement est sur le point d'atteindre le Guil. Une route provisoire a dû être construite sur la rive opposée pour assurer l'accès au haut Guil.

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Les impacts sur l'agriculture de montagne

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L’agriculture de montagne va devoir composer avec des extrêmes climatiques plus intenses et fréquents. les contraintes liées au climat se multiplient (stades phénologiques avancés (1), gel précoce et tardif, saison estivale plus longue, apparition de maladies sur les cultures, gestion de l’eau...).

Toutefois, les enjeux autour de l’adaptation au changement climatique peuvent représenter autant d’opportunités à saisir pour une agriculture en cohérence avec son territoire, plus intégrée, plus diversifiée, plus résiliente face aux aléas, et ainsi en capacité de maintenir production et autonomie fourragère.

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Les impacts sur les forêts alpines

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Les forêts voient l’avancée des stades phénologiques (1) qui perturbe les cycles végétatifs et rend les arbres plus vulnérables au risque de gel. Sous l’effet de l’élévation de la température, la répartition des espèces et des aires forestières change. Certaines espèces sont déjà et seront plus fortement impactées, comme le sapin, l’épicéa, le chêne blanc qui a déjà une mortalité forte des branches et de fortes pertes de croissance, le pin sylvestre qui souffre particulièrement. Pour toutes ces espèces, la mortalité d’arbres est deux à quatre fois supérieure à la normale jusqu’à 1400 m et le danger de dépérissement est imminent. Le pin noir, qui avait résisté jusqu’en 2010 environ, commence aussi à montrer des signes inquiétants d’affaiblissement. Sur ces arbres déjà en souffrance s’ajoute une pression croissante généralisée des maladies et parasites comme le gui, la chenille processionnaire ou certains insectes xylophages et champignons pathogènes.

À plus haute altitude, on devrait observer une extension des espèces forestières par colonisation des milieux devenus plus favorables. Cette remontée a déjà été de l’ordre de 29 mètres par décennie au cours du XXe siècle. En revanche, la limite supérieure des arbres est restée stable, malgré l’augmentation de densité des populations dans ces zones, les remontées observées étant principalement dues à la déprise pastorale.

Glacier Noir - Colonisation par les mélèzes

Colonisation par les mélèzes suite au retrait du Glacier Noir. Photo Vallouimages, juin 2014.

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Les impacts sur la biodiversité

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Le changement climatique ajoute ses effets à l’érosion grave de la biodiversité.

Dans un premier temps, l’activité biologique des plantes s’est accrue ces 30 dernières années provoquant un « verdissement » des montagnes. La végétation a gagné du terrain sur les surfaces minérales telles que les éboulis, parois, alluvions, espaces libérés par la fonte des névés et glaciers. Les espèces végétales sont donc actuellement en phase d’extension, et non de retrait ou de perte.

Sur le plus long terme, les espèces alpines adaptées à des conditions écologiques spécifiques sont clairement menacées. Le changement climatique, en bouleversant les équilibres écologiques alpins, favorise la colonisation d’espèces qui fuyaient jusqu’ici le climat montagnard. La banalisation des différentes espèces d’altitude qui présentent une biodiversité singulière est un risque majeur : la faune et la flore des écosystèmes alpins disparaissent au profit d’espèces plus « communes », issues de tranches altitudinales inférieures, qui gagnent du terrain et renforcent la concurrence au sein de la biodiversité alpine. Le lièvre commun supplante désormais par exemple le lièvre variable et les plantes spécifiques des combes à neige disparaissent au profit d’une végétation qui se développait à basse altitude. Après une phase d’extension, les espèces d’altitude risquent donc de connaître une très forte régression, dont l’ampleur est encore mal évaluée. Même les marmottes commencent à voir leurs populations décliner à cause de l’amincissement de la couverture neigeuse hivernale qui accentue le froid dans les terriers.

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Les impacts sur l'économie

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Les stations de montagne sont évidemment en première ligne avec plusieurs paramètres qui se dégradent :

  • la fiabilité de l’enneigement naturel, basée sur les domaines skiables susceptibles d’ouvrir 100 jours avec au moins 30 cm de neige au sol, s’élèverait au-dessus de 1600-1700, voire 1800 mètres d’altitude en 2050 ;

  • si, avec une augmentation de la température de l’air de 2°C par rapport à la période préindustrielle (proche de la situation actuelle), 80 % des domaines skiables dans les Hautes-Alpes seraient encore opérationnels, les écarts se creusent entre les massifs avec une augmentation possible de +4°C si de sévères mesures d’atténuation de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale ne sont rapidement pas mises en œuvre, le taux d’enneigement fiable serait proche de 70 % en Savoie, mais seulement de 30 % dans les Hautes-Alpes et de 10 % dans les Alpes-de-Haute-Provence.

  • Cette vulnérabilité serait encore aggravée par la forte variabilité interannuelle de l’enneigement dans les Alpes du Sud (typique du climat montagnard méditerranéen).

Or, le rapport met en exergue plusieurs faiblesses structurelles des stations de montagne des Alpes du Sud :

  • une problématique financière délicate, avec une course à l’investissement qui fait peser un poids supplémentaire sur les finances des collectivités locales déjà en difficulté ;

  • une variabilité interannuelle du climat entraînant un enneigement aléatoire, notamment en fin de saison ;

  • la durée des 100 jours d’ouverture n’est pas toujours garantie dans les Alpes du Sud ;

  • dans un marché des sports d’hiver extrêmement concurrentiel du fait de la stagnation de la fréquentation, les stations des Alpes du Sud sont éloignées des grandes voies de communication.

Il enfonce le clou, en dressant un constat maintes fois fait : «  Malgré ce contexte, les acteurs des stations de sports d’hiver des Alpes du Sud continuent de centrer leur activité autour de la neige. Le modèle souhaité est celui des Alpes du Nord et non un positionnement spécifique à leur territoire. En termes d’aménagement, la construction de lits neufs continue à se poursuivre dans plusieurs stations. La diversification de l’offre touristique reste à la marge, même si des efforts sont manifestes, et perçue comme un simple complément à l’activité ski. »

Pour rester optimiste, il espère que « la mise en place des espaces valléens dans les Alpes du Sud va permettre de repenser en profondeur l’offre touristique des territoires. Le nouveau visage des stations de sports d’hiver se dessinera et leur capacité à diversifier leur offre touristique en valorisant les ressources locales sera renforcée. »

Après avoir évoqué la résilience de l’économie circulaire et numérique, le rapport juge essentiel d’engager une stratégie de transition écologique « car porteuse de nombreuses retombées positives sécurisant la capacité d’habiter le territoire ».

Sans surprise la mobilité est pointée du doigt comme étant le parent pauvre des territoires alpins, mais le rapport donne « des éléments qui pourraient guider l’évolution des modes de transport dans les Alpes ces prochaines années ».

Train des merveilles en gare de Saint-Dalmas-de-Tende

Le Train des merveilles (ligne Nice-Tende) en gare de Saint-Dalmas-de-Tende.

Photo Vallouimages, mai 2003.

Le rapport se termine sur l’urbanisme de montagne. Il ne mâche pas ses mots (ni les maux !) : « L’urbanisme qui se contente de prolonger les tendances est irresponsable et révolu. Nous avons aujourd’hui les outils pour anticiper les conséquences du changement climatique et infléchir la dégradation de la biodiversité, si nous le décidons. Mais il sera nécessaire de réhabiliter la pensée à long terme et de rendre tous leurs moyens aux équipes d’urbanistes pluridisciplinaires. »

« Pour l’urbanisme de demain, les grands axes à privilégier sont : gérer le foncier, penser ‘local’, développer les mobilités, encourager le sens de la collectivité et… privilégier la culture. »

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En conclusion, le rapport rappelle que « les risques sont objectifs, ne rien faire n’est pas une option » et « la résignation, comme l’inaction évoquée en amont, n’est pas envisageable ».

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Vallouimages

Vallouise, 02 novembre 2018.

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Notes :

(1) La phénologie est l'étude des variations des phénomènes périodiques de la vie animale et végétale, en fonction du climat.

Lisa Wingate, La Phénologie, indicateur du changement climatique, INRA, février 2015.

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Références :

Impacts du changement climatique et transition(s) dans les Alpes du Sud, Les cahiers du GREC-SUD édités par l’Association pour l’innovation et la recherche au service du climat (AIR), octobre 2018, 48 pages. ISBN : 9782956006060.

Climat et changement climatique en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Les cahiers du GREC-PACA édités par l’Association pour l’innovation et la recherche au service du climat (AIR), mai 2016, 44 pages. ISBN : 9782956006015.

Provence-Alpes-Côte d’Azur, une région face au changement climatique, Les cahiers du GREC-PACA édités par l’Association pour l’innovation et la recherche au service du climat (AIR), juin 2015, 40 pages.

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Articles connexes :

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Liens connexes :

Changement climatique en Suisse, Office fédéral de météorologie et de climatologie MétéoSuisse, 25 avril 2018.

Observatoire pyrénéen du changement climatique.

Alpes du Nord : nouvelles projections climatiques de l'enneigement à moyenne altitude, MétéoFrance, 17 avril 2018.

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