Haute Romanche
Les difficultés ont
commencé avant !
_______________
Une
récente étude
(1),
réalisée
par le cabinet Cibles et stratégie et diligentée par la Chambre de commerce
et d’industrie des Hautes-Alpes, a conclu que le territoire de la haute
Romanche était déjà en difficulté avant la coupure de la route du Chambon. À
une situation structurelle critique s’est ainsi ajouté un élément
conjoncturel détonateur, la conjonction des deux expliquant probablement la
sinistrose qui a tout submergé.
_______________
Un tourisme en question
(2)
Le
tourisme est le
moteur
principal de l’économie locale. Il s’agit d’un tourisme de passage et d’un
tourisme résidentialiste
(3)
dont le poids est majeur dans la mesure où les résidences secondaires
représentent 84 % des capacités d’hébergement (4)
et 67 % des logements (72 % à La Grave, 61 % à Villar-d’Arêne) (5).
En clair, la haute Romanche n’est pas une destination de séjour pour les
touristes, c’est un lieu de passage et un lieu de résidences. Il s’agit là
d’une faiblesse critique, notamment au niveau des résidences secondaires qui
correspondent de plus en plus à des lits froids.
Le
tourisme de passage s’est effondré avec la coupure de la route, mais il
semble bien aussi que le tourisme résidentiel se soit également effondré.
Autrement dit, les résidents secondaires ont en quelque sorte manqué à leur
devoir de solidarité par rapport aux villages où ils possèdent une
résidence. On ne peut pas évoquer la question de l’accès pour des habitués
des lieux venant chez eux pour plusieurs jours. Ce qui aurait dû être une
force en période critique a néanmoins failli.
Pour
l’avenir, le territoire doit devenir une destination de séjour et plus
seulement un lieu de passage
(2).
S’il veut (re)devenir attractif, il doit absolument refuser justement d’être
une zone de transit pour les poids-lourds. C’est son handicap touristique
majeur. Comment voulez-vous investir dans des hébergements, dont beaucoup
sont à rénover, avec des camions qui passent sous les fenêtres tout au long
de la journée ? Poids lourds ou touristes, il va falloir choisir !
_______________
Une démographie en contraste
En
1999, la population de l’ex-canton de La Grave s’élevait à 730 habitants,
dont 511 pour La Grave et 219 pour Villar-d’Arêne, soit respectivement 70 %
et 30 %. En 2012, elle était de 797 (+67), mais la population de La Grave
avait chuté à 487 habitants (-24) et ne représentait plus que 61 % du total,
tandis que celle de Villar-d’Arêne avait progressé à 310 (+91) et
représentait 39 % du total
(6).
Le
solde migratoire est négatif à La Grave depuis 1999 : -1,2 % par an entre
2007 et 1999 et -1,5 % par an entre 2012 et 2007. Sa dégradation
s’amplifiait déjà avant même la coupure de la route. Heureusement le solde
naturel atténuait un peu le solde migratoire (respectivement +0,8 % par an
et +1,2 % par an pour les deux périodes). Mais la tendance lourde est au
vieillissement de la population. Autrement dit, l’indicateur démographique
était déjà dans le rouge depuis une bonne quinzaine d’années à La Grave. A
contrario, le solde migratoire est positif à Villar-d’Arêne depuis 1999 :
+2,3 % par an entre 2007 et 1999 et +1,3 % par an entre 2012 et 2007. Plus
surement que dans les urnes, les habitants votent avec leurs pieds et le
solde migratoire est un excellent révélateur de l’attractivité d’un
territoire.
_______________
Un territoire mal défini et désorienté
(7)
La
suppression du canton de La Grave oblige à trouver une nouvelle appellation
pour le désigner. Le consensus semble se faire autour du terme géographique
de « haute Romanche ». Bien sûr, on n’oublie pas que La Grave et
Villar-d’Arêne appartiennent géographiquement et historiquement à l’Oisans
(et non au Briançonnais), mais « haute Romanche » (« Haute-Romanche » si le
nom devenait officiel) est tout à fait correct et commence à se généraliser.
On espérait l’année dernière que la dureté des temps pousserait les deux
communes à se rapprocher (8). Une fenêtre d’opportunité
avec des incitations financières s’est refermée le 31 mars sans que les
communes bougent. Il y aurait pourtant urgence à donner une identité et un
projet à ce territoire, à définir son orientation iséroise ou haut-alpine
et, bon sang de bon sang, à sortir de la sinistrose actuelle et à enfin
adopter une stratégie de communication positive qui manque tant.
_______________
Une communication à recréer
(9,
10)
La
situation est en effet critique sur le plan de la promotion du territoire,
une fois son identité et son projet définis. La crise actuelle a mis en
évidence la faillite de la communication autour de la Meije. Voici une
« tour Eiffel » qui n’est plus attractive par elle-même. Pour le court
terme, pour cet été, il y a urgence. Une faiblesse a disparu : le passage
des poids-lourds et des camping-cars ; un atout est apparu : le calme
retrouvé ; il faut en profiter. De toute façon, il faut absolument sortir de
la communication actuelle où la « victimisation » l'emporte sur la
« valorisation ». Il y va de l’avenir du territoire. En comptant aussi et
encore sur la solidarité des Haut-Alpins...
_______________
Vallouimages
Vallouise, 08 mai
2016.
_______________
Notes :
(1)
« Un territoire déjà en difficulté
avant la fermeture du Chambon », Le Dauphiné Libéré, édition des
Hautes-Alpes et Alpes-de-Haute-Provence, 5 mai 2016.
(2)
Réflexions 3 in « Tunnel
du Chambon - Un espoir après six mois de galère », Vallouimages, 10
octobre 2015.
(3) Au
sens strict, le résidentialisme ne fait pas partie du tourisme. On réalise
même de plus en plus que l’immobilier va à l’encontre du développement
touristique.
(4)
Cabinet Cibles et stratégies, Dauphiné Libéré, 5 mai 2016.
(5)
« Évolution du nombre de logements par catégorie », La Grave et de
Villar-d’Arêne, Insee, RP2012 exploitations principales.
(6)
Insee, RP 1999 dénombrement, RP 2007 et RP 2012 exploitations principales.
(7)
Réflexions 1 in « Tunnel
du Chambon - Un espoir après six mois de galère », Vallouimages, 10
octobre 2015.
(8) « Haute
Romanche - Une future nouvelle commune « La Meije » ? », Vallouimages,
15 mai 2015.
(9)
Réflexions 2 in « Tunnel
du Chambon - Un espoir après six mois de galère », Vallouimages, 10
octobre 2015.
(10)
« Haute
Romanche - Questions de communication »,
Vallouimages, 01 juillet 2015.
_______________
Références :
...
_______________
Articles connexes :
Tunnel du Chambon - Un espoir après
six mois de galère, Vallouimages, 10 octobre 2015.
Communiqué de presse du 8 juillet,
Vallouimages, 08 juillet 2015.
Toujours pas de pilote dans l'avion,
Vallouimages, 07 juillet 2015.
Réunion de crise,
Vallouimages, 06 juillet 2015.
Tunnel du Chambon - La nature
n'a pas voulu, Vallouimages, 05 juillet
2015.
Haute Romanche - « Les dégâts
humains n'ont pas de prix »,
Vallouimages, 03 juillet 2015.
Tunnel
du Chambon - Chute imminente, Vallouimages, 02 juillet 2015.
Haute
Romanche - Questions de communication, Vallouimages, 01 juillet 2015.
Tunnel du Chambon - Ça
tire dans tous les sens, Vallouimages, 09 juin 2015.
Haute
Romanche - Une future nouvelle commune « La Meije » ?, Vallouimages, 15 mai
2015.
Réflexions à propos de la coupure de
la route Grenoble-Briançon, Vallouimages, 14 mai 2015.
Coupure
de la route Grenoble-Briançon au Chambon, Vallouimages, 16 avril 2015.
_______________
Liens connexes :
Tunnel du Chambon : Actualités, L'information officielle sur le Tunnel du
Chambon, Département de l'Isère.
Forum
du Collectif du Chambon.
Page Facebook des « Naufragés du Chambon ».
Les
informations au fur et à mesure, L'e-media 05.
Le Collectif salue la rive gauche mais reste vigilant, Alpes 1, 19 octobre
2015.
Route de secours : « On aura une grande capacité d’adaptation »,
Leïla Shahshahani, Montagnes-magazine, 15
octobre 2015.
Une déviation routière d'ici la fin du mois,
Jeanne Boussageon, Montagnes-magazine,
6 octobre 2015.
Tunnel du Chambon : face à l'urgence, Véronique Granger, octobre 2015.
Retrouver la vallée en haute Romanche, Philippe Pelletier, la lettre
d'Orion, Libération, 12 août 2015.
Vallée sans issue, François Carrel, Libération, 23 juillet 2015.
La Grave/Chambon : état des lieux, Loïc Giaccone, Skipass, 06 août 2015.
_______________